ET CONCRÈTEMENT

Vers des logements vivants ?

 

Les universités britanniques de Newcastle et de Northumbria planchent sur les nouvelles possibilités de la biologie en matière de construction. L’enjeu ? Créer des bâtiments qui font partie intégrante de la nature… Une innovation qui préfigure l’avenir de nos logements ?

 

Mini-forêts, végétalisation de toits ou de façades, agriculture urbaine… depuis quelques années, la nature pousse en ville pour le plaisir de tous et toutes. Mais pas seulement, il s’agit également de répondre partiellement aux enjeux de biodiversité et de pollution de l’air en milieu urbain. Et la pandémie de Covid-19, qui a un impact majeur sur notre prise de conscience de la crise climatique, accélère un peu plus ces projets de renaturation. À Bordeaux, tous les habitant·es devraient bénéficier, à terme, d’un espace végétalisé à moins de 10 minutes à pied. À Lyon, la ville plante ses premiers vergers pour développer la cueillette en ville. Dans le quartier Nantes Nord, on place la nature au service de la cohésion sociale. Des projets qui divisent parfois les architectes paysagistes, certain·es dénonçant le risque d’agir en dépit du bon sens. Alors que penser, aujourd’hui, de cette tentation de rendre nos futurs bâtiments et logements vivants ?

 

Biotechnologie dans la construction, ou la naissance d’un nouveau domaine de recherche

 Tout a commencé à l’été 2019. Les équipes des universités de Newcastle et de Northumbria ont reçu conjointement la jolie somme de 8,81 millions d’euros pour réaliser le premier centre de recherche au monde sur la biotechnologie dans l’environnement bâti. Ce nouveau hub abrite aujourd’hui une maison biologique expérimentale et un laboratoire de micro-conception. « En réunissant des architectes, des ingénieurs et des scientifiques, en travaillant avec l’industrie et en investissant dans des installations à la pointe de la technologie, nous visons à repenser l’industrie du bâtiment », expliquait l’année dernière, Martyn Dade-Roberston, le co-directeur du hub. Tout ceci pour inventer des logements vivants, vraiment ? « L’idée peut sembler farfelue, mais face à la crise climatique, nous avons besoin de repenser radicalement notre façon d’habiter et de concevoir notre environnement », répond celui qui porte également le titre de professeur de technologies émergentes.

 

Nous avons besoin de repenser radicalement notre façon d’habiter et de concevoir notre environnement 

 

De nouvelles techniques pour rendre nos logements… vivants

 Et si le champignon s’imposait, demain, dans la construction ? Comme il pousse simplement et rapidement, le mycélium pourrait créer des matériaux aux excellentes performances structurelles, selon une étude du magazine Scientific American. La Nasa travaille sur un projet de myco-architecture avec des habitats qui se “reproduiraient” d’eux-mêmes

dans la perspective de voyages sur d’autres planètes. C’est à partir de ces travaux que les universitaires projettent des bâtiments qui poussent (presque) comme des champignons. Et qui, demain, s’auto-guérissent ? Aux Pays-Bas, des universitaires souhaitent incorporer des spores bactériennes, c’est-à-dire des graines de bactéries, dans le mélange avec lequel on fabrique du béton. Dans le cas d’un béton fissuré, la bactérie se réactive au contact de l’eau, déclenchant un processus chimique qui fait croître de nouveaux cristaux de calcite capables ainsi d’« auto-cicatriser » le béton.

Les autres pistes développées par l’équipe de recherche pour des logements vivants sont tout aussi prometteuses et fascinantes. À l’instar d’un projet soutenu par le prestigieux Institut de technologie de Massachusetts (MIT) qui se concentre cette fois sur la respiration des bâtiments. Son innovation ? Des matériaux dont la forme peut varier en présence d’eau. Sur le même principe que ces vêtements modernes qui réagissent à la transpiration, le matériau se contracte et change de forme lorsqu’il sèche. « Mon équipe a commencé à explorer la possibilité d’étendre cette méthode à la construction, pour créer au sein des bâtiments des membranes capables de « transpirer » à mesure que l’humidité intérieure augmente. En utilisant des membranes en latex, recouvertes de spores bactériennes, le matériau s’assouplira et ouvrira ses pores – comme les glandes qui sécrètent la sueur -, permettant à l’air de circuler à travers les parois », explique Martyn Dade-Robertson. Le spécialiste en biotechnologie parle même de “cuisine probiotique” ! Kesako ? Des cuisines bioréceptives, c’est-à-dire capables de favoriser la croissance de bactéries connues pour offrir une résistance aux insectes qui causent des maladies. Qu’importe si les bâtiments du futur seront vivants ou pas, ce qu’il faut retenir, c’est que la recherche pour décarboner nos bâtis, elle, est bel et bien vivante !

 

 

 

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