ENGAGÉ·ES

Le béton de chanvre s’invite dans le logement social : rencontre avec Daniel Daviller de BCB Tradical®

 

béton de chanvre 3F

A Boulogne-Billancourt, 3F construit le premier immeuble de hauteur (R+8) en béton de chanvre en Europe en partenariat avec le fabricant BCB Tradical®. Quels sont les atouts de ce matériau ? Décryptage avec Daniel Daviller, directeur général délégué de BCB Tradical®.

 

Quelles sont les activités de BCB Tradical® ?

David Daviller BCBDaniel Daviller : BCB Tradical® est à la fois un centre d’expertise et de commercialisation. En tant que centre d’expertise, notre mission est de développer de nouvelles applications pour l’utilisation de la chaux aérienne dans la construction. BCB Tradical® a développé il y a un peu plus de 25 ans une application au béton de chanvre, en utilisant au départ des sous-produits de la production du chanvre. Habituellement utilisée en litière animale, nous avons trouvé d’autres applications à sa chènevotte*, comme l’isolation ou encore le remplissage.

 

 

 

 

Comment est né ce projet de construction d’un immeuble en béton de chanvre avec 3F ?

 Dans le cadre du concours pour la construction de ce programme de logements sociaux, 3F a demandé une lettre de méthodologie et a été séduit par une construction avec un béton de chanvre. L’idée a été proposée par l’agence d’architecture North by Northwest, avec laquelle  nous avions déjà travaillé sur plusieurs projets. Je pense que la dimension écologique et durable du béton de chanvre a convaincu 3F.

 

 Quel est le marché du béton de chanvre aujourd’hui ?

 En termes de structure la France est certainement le premier marché du monde : C’est le seul pays d’Europe qui n’a pas laissé tomber sa filière chanvre, grâce, notamment à la filière du papier. Et aussi parce qu’elle a développé des règles professionnelles, des normes pour les produits de construction et des normes pour la chènevotte qui est utilisée. En France, les chanvrières sont de très belles coopératives réparties sur tout le territoire, qui sont rentables et fonctionnent très bien. C’est un marché florissant qui permet de redéployer l’emploi dans les régions avec des chanvrières qui font travailler les agriculteurs, la filière de transformation, la filière bois et des ouvriers qui vont mettre en place le béton de chanvre sur les immeubles.

 

« En France, les chanvrières sont de très belles coopératives réparties sur tout le territoire, qui sont rentables et fonctionnent très bien »

  

Quels sont les atouts du béton de chanvre par rapport à d’autres matériaux biosourcés ?

 Ses vertus sont nombreuses dans la construction parce qu’il échange très bien avec l’humidité de l’air. Un mur en béton de chanvre peut parfaitement réguler l’humidité d’une habitation. Il permet aussi un confort d’été comme un confort d’hiver. La deuxième qualité du béton de chanvre, c’est sa tenue au feu. Son autre qualité, c’est sa durabilité. Laisser des constructions durables pour les générations futures, pour moi, c’est très important. Les bâtiments que l’on construit en béton de chanvre, on les construit pour une centaine d’années et cela change tout !

 

« Le béton de chanvre permet un confort d’été comme un confort d’hiver »

  

Est-il plus cher que les autres matériaux ?

 Dans le neuf, le béton de chanvre sera toujours un peu plus cher. Ce qui nous guide, c’est une démarche de durabilité. Encore aujourd’hui, on construit trop souvent en ne regardant que les coûts à court terme, pas dans 10 ou 20 ans quand il faudra tout rénover. Ce qui m’intéresse dans la démarche de 3F, c’est justement de se dire, peut-être que ça coûte légèrement plus cher aujourd’hui, mais il n’y aura pas de coûts d’entretien derrière. Le confort est très intéressant pour peu de consommation énergétique. C’est une démarche que l’on retrouve de plus en plus chez les bailleurs sociaux.

  

« Les bailleurs sont de plus en plus nombreux à s’approprier les arguments du béton de chanvre »

 

 Comment favoriser le développement des matériaux biosourcés ?

 Les freins à son développement sont à 90 % réglementaires. Quand vous démarrez une filière de construction en chanvre, vous êtes confronté·e à des barrières à l’entrée phénoménales. Pour passer certains tests, il faut parfois attendre un an avant d’obtenir un simple devis. Il ne faut pas être naïf, cette lenteur est sûrement imputable à certains lobbies. Je suis le vice-président de « Construire en chanvre », une association qui réunit toutes les parties prenantes, des producteurs de chanvre aux producteurs de liants, en passant par les prescripteurs et les entreprises et qui s’attache à standardiser et diffuser les bonnes pratiques, c’est très important. Seul un volontarisme politique des régions et des bailleurs permettra d’aller plus loin avec ce matériau. C’est pour cette raison que je suis sensible à la démarche de 3F avec cet immeuble de Boulogne et avec qui nous allons continuer de développer des projets de ce type. Ce qui me rend également résolument optimiste quant à l’avenir de la filière du béton de chanvre.

 

*Brin du chanvre, partie ligneuse du chanvre dépouillée de son écorce

Découvrez ici le reportage de France 3 Ile-de-France consacré au béton de chanvre et à l’immeuble construit par 3F à Boulogne-Billancourt (92) :

 

 

Top articles