ENGAGÉ·ES

La qualité de l’air intérieur, gage d’une meilleure santé

 

Docteure en biologie, Corinne Mandin est coordinatrice opérationnelle de l’Observatoire de la qualité de l’air intérieur. A ce titre, elle mène des recherches sur les expositions humaines aux polluants présents dans les logements. Avec le Covid-19, cette question est en passe de devenir un enjeu de santé publique.

 

Pouvez-vous nous présenter les missions de l’Observatoire de la qualité de l’air intérieur?

Corinne MandinL’Observatoire de la qualité de l’air intérieur (OQAIest né en 2001 à l’initiative du ministère du logement pour mieux connaître la pollution intérieure et ses origines. L’Observatoire organise notamment des campagnes de mesure pour apporter des solutions adaptées à la prévention et à la surveillance de la qualité de l’air intérieur à travers la sensibilisation des professionnel·les mais aussi l’information du grand public.  

 

 

Comment mesure-t-on la qualité de l’air intérieur ?

Nous prélevons de l’air avec un matériau absorbant qui capte les composés gazeux. Pour les particules en suspension dans l’air, nous les prélevons avec une pompe équipée d’un filtre. Nous analysons ensuite ces échantillons en laboratoire. Nous n’utilisons pas un appareil unique pour effectuer ces mesures car cette pollution est très variée… Elle peut être d’origine chimique, comme biologique… Il peut y avoir des virus, des moisissures, mais aussi des gaz comme par exemple le radon, un gaz radioactif, ou encore des fibres comme l’amiante. 

 

Pour éviter allergies, complications respiratoires et maux de tête, il est préconisé d’aérer pour éliminer l’air vicié.

 

 

D’où vient cette pollution?

Elle est générée par les peintures murales, les revêtements de sol, les meubles, les appareils de chauffage, mais aussi par le tabagisme, le bricolage, le parfum, les produits cosmétiques, les animaux domestiques, et plus généralement par tous les produits du quotidien qui émettent des substances volatiles ! Pour éviter allergies, complications respiratoires et maux de tête, il est préconisé d’ouvrir régulièrement les fenêtres pour éliminer l’air vicié. Cette problématique fait actuellement l’objet d’une prise de conscience au sein de la société. De plus en plus, les dirigeant·es politiques, les entreprises, les constructeurs, les gestionnaires de bâtiments et les bailleurs se sentent concernés par le sujet. 

 

C’est un débat qui est récent?

Indéniablement ! Historiquement, c’est la qualité de l’air extérieur qui était prise en compte. En France, c’est en 2004 que le premier plan santé / environnement a reconnu l’Observatoire de la qualité de l’air intérieur comme prioritaire pour documenter les expositions de la population. Ce sujet est resté confidentiel pendant longtemps. En 2007, le Grenelle de l’environnement a fait bouger les choses avec l’obligation de surveiller la qualité de l’air intérieur pour les établissements recevant du public, et un étiquetage des matériaux de construction et de décoration en fonction de leur potentiel d’émission de composés gazeux.Aujourd’hui, les réglementations thermiques qui visent à une plus grande sobriété énergétique des bâtiments poussent la filière à construire des structures très étanches, ce qui présente un risque pour la qualité de l’air intérieur.  

 

Nous avons pu observer qu’il peut exister des moisissures en développement même dans les bâtiments neufs.

 

Comment les bailleurs sociaux s’emparent-ils du sujet?

Nous avons travaillé avec 3F sur deux études. La première date de 2017. Nous avons réalisé des mesures dans 40 logements neufs car 3F voulait avoir une estimation du niveau de qualité de l’air en fonction des choix de revêtements et de ventilation. Nous avons pu observer qu’il peut exister des moisissures en développement même dans les bâtiments neufs. Ceci est lié au raccourcissement de la durée des chantiers qui ne laisse pas le temps aux matériaux de sécher correctement. La deuxième étude, actuellement en cours, consiste à effectuer des mesures avant et après la rénovation d’un logement pour vérifier que la qualité de l’air intérieur n’a pas été altérée. 3F fait partie des bailleurs sociaux qui sont particulièrement sensibilisés au sujet. Ces études permettent de mettre en lumière les améliorations à apporter dans la façon de construire ou de rénover. 

 

Rendre les bâtiments neufs énergétiquement performants ne doit pas signifier dégrader la qualité de l’air intérieur.

 

 

A quoi peut-on s’attendre dans les prochaines années?

Rendre les bâtiments neufs énergétiquement performants ne doit pas signifier dégrader la qualité de l’air intérieur. Chacun·e doit aussi être sensibilisé·e aux bons gestes pour améliorer la qualité de l’air dans son logement. Il faut par exemple respecter les recommandations d’usage des produits de nettoyage… et il faut bien évidemment ouvrir les fenêtres régulièrement. De son côté, la filière du BTP pourrait, à terme, mieux prendre en compte la qualité de l’air dans les constructions neuves et dans les chantiers de rénovation.   

 

 

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