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Capsa Container, la construction modulaire pour la ville de demain

 

 

Cédric Denoyel, fondateur de Capsa Container

Des durées et des coûts de construction trop élevés, des usages de la ville qui ne cessent de se réinventer… tel est le point de vue de Cédric Denoyel, le fondateur entrepreneur de Capsa Container, une société de revalorisation des containers maritimes. Selon lui, la construction en modules et les démarches de construction “hors site” sont une des clés pour construire une ville qui s’adapte plus rapidement et donc mieux aux usages et aux comportements urbains de chacun et chacune.

 

Comment s’est amorcée votre carrière d’entrepreneur, et avec elle, l’idée de fonder Capsa Container ?

 

J’ai créé Capsa Container en 2013, il y a donc maintenant 5 ans. Mais je suis entré dans le monde du container en 2004 grâce au second mari de ma mère. Il avait une petite entreprise de containers maritimes qu’il revendait essentiellement à des acteur·rice·s du monde maritime ou du BTP. C’était une petite boîte tout à fait rentable, à laquelle j’ai participé jusqu’en 2007. Ensuite, l’entreprise a été revendue à un groupe, qui m’a par la suite nommé directeur général.

 

Entre temps, et dans le cadre de la Fête des Lumières à Lyon en 2005, j’ai rencontré des artistes qui réalisaient des œuvres à base de containers maritimes. Cette rencontre culturelle a été pour moi comme un déclic puisqu’elle m’a permis d’ouvrir les yeux sur ce qui pouvait être fait à partir de containers. C’est aussi à ce moment-là que je me suis aperçu que cet objet pouvait avoir une réelle utilité dans une multitude de sujets. J’ai d’ailleurs participé en 2009 à l’élaboration de la cité universitaire au Havre.

 

L’activité du groupe dans lequel j’étais consistait en particulier en la gestion des containers sur les ports maritimes de France, ce que je ne trouvais pas vraiment sexy ni innovant. Mais quand j’ai voulu approfondir cette idée de transformer des containers à des utilisations diverses et variées, le président de l’époque du groupe estimait la démarche trop risquée pour son entreprise alors très rentable. J’ai donc décidé de quitter ce groupe avant de fonder Capsa Container en janvier 2013.

 

En quoi consiste Capsa Container ?

 

Comme j’avais déjà une expérience assez globale du container, depuis sa fabrication jusqu’à son achat, je savais à peu près comment les transformer. Mais je manquais de compétences techniques. La première chose que j’ai faite en créant Capsa était donc de monter un bureau d’études. Je me suis entouré de partenaires qui étaient principalement des ami·e·s et avec lesquels j’aimais bien travailler. Ils croyaient en ce que je faisais, donc je me suis associé moralement avec des architectes pour que l’on puisse travailler ensemble sur l’adaptation des containers au monde de la construction ou au monde de l’événementiel.

 

Dans la société actuelle, nous classons beaucoup les produits en fonction de leurs usages. Chez Capsa nous avons donc segmenté les différents métiers : Capsa Container ne transforme pas seulement des containers. Capsa réalise des containers pour travailler avec des industriels, des containers pour l’événementiel avec des objets sur-mesure… Mais Capsa réalise également des containers qui répondent à des problématiques plus sociales comme la création de logements d’urgence ou d’écoles.

 

Quand les containers ont rempli leur fonction première de transport de marchandises, de nombreuses étapes suivent pour qu’ils puissent être livrés aux clients. A quel moment et comment intervenez-vous dans ce processus ?

 

Toutes ! Ce qui est assez magique dans notre métier c’est que nous avons un pouvoir d’imagination totalement dingue. C’est-à-dire que si je vais rencontrer un·e boucher·ère, je sais de quelle manière elle·il pourrait utiliser un container. Je sais comment Capsa pourrait le transformer pour s’adapter aux besoins du métier. Nous pouvons par exemple lui proposer une rôtisserie itinérante. Nous intervenons depuis la conception jusqu’à la réalisation. Plusieurs cas de figure existent, il se peut que notre client·e arrive avec une idée très précise de ce qu’elle·il veut, elle·il peut également avoir envie de profiter de cette tendance des containers mais sans trop savoir comment les utiliser. Notre objectif est de concevoir le produit avec les client·e·s de A à Z.

 

En plus des architectes, ingénieur·e·s, designers, qui concernent la partie bureau, nous avons aussi une usine de 6 000 m², dans laquelle nous avons tous les corps de métiers : chaudronnerie, menuiserie, plomberie, électricité, peinture… Le principe c’est que, pour tous les secteurs d’activité (sauf la construction), le produit sorte totalement fini de chez nous.

 

De quelle manière adaptez-vous le container au milieu urbain ?

 

Ce qu’il faut savoir pour comprendre mon schéma idéaliste de la ville, c’est que je suis également membre d’une association qui gère notamment le festival Nuits Sonores. Ce dernier investit vraiment la ville, de manière éphémère. Quand nous organisons le festival Nuits Sonores, nous l’organisons systématiquement en centre-ville ou en périphérie proche, dans des zones urbaines, comme des friches industrielles, que l’on revisite le temps du festival.

 

Dans ce cadre, la réutilisation des containers a été portée par des architectes scénographes. Pour eux, l’idée correspondait parfaitement à ce qui était recherché, notamment par le caractère démontable. Il y a une petite dizaine d’années, nous avions fait un village avec 60 containers dans une friche industrielle. On pouvait y trouver des magasins, des toilettes ou encore des loges pour les artistes. Tous les usages dont nous avions besoin étaient dans les containers.

 

Ce qui m’a donné envie de poursuivre dans cette lancée, avant de fonder Capsa, c’était justement ce mode éphémère que l’on adaptait aux villes. Appliqué aux friches industrielles, cela permet d’offrir aux citadins une nouvelle réalité urbaine ! Cela contribue à ce mouvement qui de plus en plus, donne une chance aux zones abandonnées, aux zones de transitions, en attente de leur futur.

Selon vous, en quoi le recyclage des containers maritimes peut-il constituer une alternative urbaine ?

 

Le container est un produit manufacturé qui existe depuis 1949. C’est un produit universel, dont tout le monde sait se servir ou transporter, bien que ça soit un objet massif. Il est utilisé dans le monde entier, il s’en fabrique sans arrêt et sa solidité est sans faille. Je trouve que le fait de recycler un tel objet est assez génial car avec un peu d’ingénierie et de technique on peut arriver à en faire des choses à la fois magnifiques, pratiques, et qui peuvent en plus porter un intérêt social. Par exemple chez Capsa, nous travaillons beaucoup sur des questions de logement d’urgence. En fait, nous répondons à notre manière à des problématiques sociétales, dont les changements de comportements et d’usages peuvent souvent être la clé.

 

Ce qui me plaît, c’est de donner un coup de pouce aux associations culturelles, en leur proposant des containers dans le cadre de leurs différents projets. Je suis toujours prêt à les aider, à leur prêter un produit pendant quelques jours. La création de Capsa est initialement issue de rencontres avec le monde de la culture, et c’est pour cette raison que j’aime l’idée d’essayer de la déployer à ma manière, par des actions qui peuvent relever du bénévolat ou bien du mécénat.

 

De quelle manière le développement de Capsa Container vous a-t-il permis de vous forger une conception particulière de la ville ?

 

Ce qui est dingue c’est de voir que nous sommes énormément sollicité·e·s par des grands groupes ou bien par des collectifs d’architectes qui font appel à nous pour travailler sur des projets urbains, dans la ville de manière générale. Nous devons donc faire face à des problématiques très intéressantes, car nous nous retrouvons en première ligne vers les villes de demain. C’est-à-dire que je suis persuadé que d’ici 10 ans, nous pourrons fabriquer des modules en containers de manière totalement pérennes.

 

Je pense aussi que la ville de demain sera extrêmement liée au fait que les personnes bougent de plus en plus. En 2018, si on dit vouloir un immeuble à tel endroit, alors il sera construit puis livré en peut-être 4 ou 5 ans. Mais avec la vitesse à laquelle changent les usages de la ville, l’usage du lieu aura lui aussi totalement évolué. Donc nous, quand nous pensons un projet, et que nous sommes capables de le livrer en moins de 10 mois, ça signifie qu’en principe on reste assez proches des usages qui sont faits sur le lieu en question.

 

 

 

Extrait : 

 

 

 

 

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